IV Droit des brevets d'invention

Conditions de la protection (art. 1 LBI)

04 octobre 2018

TF, 4 octobre 2018, 4A_282/2018 (f)  

Recours en matière civile, activité inventive, non-évidence, approche « problème-solution », complètement de l’état de fait, critique de l’état de fait, fardeau de l’allégation, arbitraire dans la constatation des faits, état de la technique ; art. 52 CBE, art. 56 CBE, art. 9 Cst., art. 29 al. 2 Cst., art. 95 LTF, art. 97 al. 1 LTF, art. 105 al. 1 LTF, art. 106 al. 2 LTF, art. 53 al. 1 CPC.

Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l’autorité précédente et ne peut s’en écarter que s’ils ont été établis de façon manifestement inexacte, ce qui correspond à la notion d’arbitraire au sens de l’art. 9 Cst., ou en violation du droit au sens de l’art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d’influer sur le sort de la cause. La critique de l’état de fait retenu est soumise au principe strict de l’allégation énoncé par l’art. 106 al. 2 LTF. La partie qui entend attaquer les faits constatés par l’autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Si elle souhaite obtenir un complètement de l’état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu’elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuves adéquats. Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s’écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (c. 2.1 et réf.cit.). Les brevets européens sont délivrés pour toute invention dans tous les domaines technologiques, à condition qu’elle soit nouvelle, qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application industrielle, en vertu de l’art. 52 CBE. Selon l’art. 56 CBE, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour l’homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. La notion de non-évidence est une notion objective. Ce ne sont ni les efforts déployés personnellement par l’inventeur, ni ses connaissances subjectives qui importent à cet égard, mais uniquement l’écart mesurable entre le résultat de l’invention et l’état de la technique. Font partie de l’état de la technique toutes les données accessibles au public, à la date de dépôt ou de priorité. L’examen de l’activité inventive suppose que l’on considère l’état de la technique dans sa globalité, telle une mosaïque. Pour ce faire, on commencera, en règle générale, par rechercher le document comportant le plus grand nombre de caractéristiques techniques en commun avec l’invention. On comparera ensuite l’invention avec l’état de la technique pertinent afin de déterminer les différences structurelles et fonctionnelles et, sur cette base, le problème technique que l’invention cherche à résoudre. Enfin, on examinera les pas que l’homme de métier devait effectuer afin de parvenir, en partant de l’état de la technique, au même résultat que l’invention conformément au principe de l’approche « problème-solution » (c. 3.1.2 et réf.cit.). Toutes les données accessibles au public, y compris les documents particulièrement anciens, font partie de l’état de la technique. Ecarter un document de ceux que consulterait l’homme de métier en raison de son ancienneté reviendrait à priver les brevets ayant dépassé un certain âge de toute valeur dans le cadre de l’analyse de l’effet inventif. Une telle pratique ne saurait être déduite de l’art. 56 CBE. Le facteur temporel peut néanmoins jouer un rôle dans le cadre de l’analyse de l’activité inventive. L’exigence d’un besoin insatisfait depuis longtemps peut ainsi faire partie des indices suggérant une activité inventive digne de protection (c. 3.1.3). L’âge des documents n’est pas à lui seul décisif dans le cadre de la détermination de l’état de la technique. L’élément déterminant est plutôt l’obsolescence ou la désuétude d’une technique faisant l’objet d’un document ancien, ce qui exclut sa prise en considération par l’homme de métier (c. 3.1.4.2). [NT]